La protection des droits des enfants issus de la migration est une question d’humanité. Elle est essentielle pour un avenir stable.
Par Dereje Wordofa
À quoi pensons-nous quand nous entendons le mot « migrant » ? Pour certains, il s’agit d’un terme neutre qui décrit un individu qui va d’un endroit à un autre, la plupart du temps à la recherche d’un travail ou de meilleures conditions de vie. Chez d’autres, il suscite la peur – peur de l’inconnu, des étrangers, d’une menace. Cette peur fait que ces personnes ne sont plus perçues comme des êtres humains. Ce sont pourtant des personnes qui recherchent une vie meilleure pour elles-mêmes, leurs familles et surtout leurs enfants. Cette peur et cette instrumentalisation ne doivent pas s’imposer.
Personne ne choisit son lieu de naissance et parfois, quitter cet endroit est le seul choix possible. Les raisons sont multiples : conflits, changement climatique, absence de perspectives économiques ou liberté religieuse inexistante.
Cette situation est particulièrement grave pour les enfants. Ils ont droit à une sollicitude et à une compassion particulières. Lorsqu’ils sont contraints de quitter leur pays à la recherche d’une vie meilleure, seuls ou avec leur famille, ce sont souvent eux qui souffrent le plus. En 2021, on comptait environ 153 000 enfants non accompagnés ou séparés de leur famille (HCR, décembre 2022 : Protecting Refugee Children – Background Guide Challenge 2). Ces enfants affrontent de graves menaces et requièrent notre soutien. Seuls, ils risquent d’être enlevés, exploités et maltraités.
Il incombe à la communauté internationale de protéger le droit des enfants issus de l’immigration et de leurs familles – 281 millions de personnes au total, dont 36,5 millions d’enfants – et de leur assurer une vie sûre et épanouie.
Cela commence par l’arrêt de la détention d’enfants dans des camps. Un enfant ne devrait pas avoir à voir des camps surpeuplés et des centres d’accueil isolés, et encore moins y grandir. De telles expériences nuisent à la santé mentale des enfants pour le reste de leur vie. Tout enfant a droit à un traitement humain. Ils méritent un endroit sûr où s’épanouir librement et sereinement et la chance de vivre une enfance normale.
Un enfant est un enfant. Quels que soient leur origine ou leur statut, les enfants ont droit à l’égalité d’accès à la protection, à des soins de santé complets et à l’éducation. Ils devraient également bénéficier immédiatement d’une prise en charge alternative appropriée lorsqu’ils sont seuls ou séparés de leur famille. Lorsque des enfants ou des adolescents sont livrés à eux-mêmes, il incombe aux autorités de travailler sans relâche pour les réunir avec leurs frères et sœurs et leur famille dans un endroit où ils peuvent grandir en toute sécurité.
La protection des droits des enfants issus de l’immigration et de leurs familles nécessite une coopération internationale et des partenariats qui transcendent les politiques et les frontières.
Nous avons prouvé que c’était faisable. Les villages d’enfants SOS au Pérou, en Colombie et au Brésil ont établi des partenariats efficaces avec d’autres organisations internationales, des gouvernements et le secteur privé pour soutenir les personnes vénézuéliennes issues de la migration. En collaboration avec le HCR, le Fonds des Nations Unies pour les réfugiés, des familles sont hébergées et prises en charge dans des villages d’enfants SOS. Le programme commun offre un hébergement sûr, une protection et des soins médicaux, et veille à ce que les familles et les frères et sœurs restent ensemble.
Ces partenariats et coopérations sont vitaux pour de nombreuses familles. C’est notamment le cas d’une jeune famille vénézuélienne qui a dû fuir au Brésil en raison d’une crise politique, de la pauvreté et des abus dans son pays d’origine. Elle était toutefois également confrontée à un avenir incertain dans sa nouvelle patrie. En collaboration avec le HCR, cette famille s’est retrouvée au village d’enfants SOS de Rio Bonito où elle a été hébergée, prise en charge et s’est vu offrir l’opportunité de prendre un nouveau départ en famille.
En Ukraine, des milliers de familles et d’enfants ukrainiens reçoivent une aide humanitaire, notamment un hébergement, un soutien psychologique et un soutien psychosocial, en collaboration avec des organisations locales. Des centaines d’enfants ayant bénéficié d’une prise en charge alternative en Ukraine vivent désormais avec les personnes responsables d’eux dans les villages d’enfants SOS de plus de 10 pays. Nous prenons également en charge des enfants du monde entier qui ont fui à l’intérieur de leur continent ou à travers le monde.
Qu’elles soient contraintes directement ou indirectement de fuir, nous devons respecter et soutenir les personnes issues de la migration dans leur cheminement vers une vie épanouie. La Journée internationale des migrants doit nous rappeler à tous de nous rassembler et d’aider nos semblables dans leur parcours, en particulier les plus vulnérables d’entre eux : les enfants.
La protection et le soutien des enfants et des jeunes issus de la migration leur offrent l’une des choses les plus importantes que nous pouvons donner à une personne : des possibilités dans la vie. Cela contribue à un avenir plus stable pour nous tous.
Dereje Wordofa est le président de SOS Villages d’Enfants International.