Notre responsable de programme Urs Bernhard nous parle de son premier voyage depuis l’apparition de la pandémie de coronavirus. Il est parti visiter les projets d’aide aux réfugiés en Grèce. Il a même rencontré Antigone et Afrodite.
Après une bonne année et demie de distanciation sociale, j’ai de nouveau fait l’expérience d’un passage de frontière à la mi-juillet. Pour être honnête, j’étais un peu nerveux avant le voyage. J’avais encore en tête les images de milliers de réfugiés devenus des pions dans la politique frontalière entre la Turquie et la Grèce. Je repensais aussi au camp de réfugiés en feu à Lesbos ou aux bateaux de réfugiés repoussés par les garde-côtes grecs récemment montrés dans les médias. Cependant, les angoisses et les épreuves indescriptibles que traversent les réfugiés sur leur chemin vers la Grèce, m’ont fait relativiser.
Au cours de mon voyage d’une semaine, j’ai visité trois sites du programme SOS Villages d’Enfants Grèce : les centres éducatifs de Crète et de Thessalonique, ainsi que le centre social avec atelier de couture d’Athènes. Depuis la grave crise des réfugiés en 2015, SOS Villages d’Enfants Grèce soutient les enfants vulnérables et les familles qui ont le statut de demandeur d’asile ou de réfugié sur les îles et le continent. Depuis la Suisse, avec l’aide du Secrétariat d’État aux migrations (SEM), nous apportons un hébergement et une intégration adaptés aux enfants. Le but de ce voyage était de me faire une idée du travail sur le terrain afin de pouvoir informer nos partenaires en Suisse.
Pendant le confinement, les salles de classe bien équipées des centres sociaux SOS sont restées vides. Héraklion, Crète.
Visite du centre éducatif SOS sur l’île de Crète
Au centre éducatif SOS de Crète, j’ai assisté à des cours de grec et de mathématiques, dispensés sur place par le personnel pédagogique SOS pour les enfants réfugiés. Les cours de soutien sont un élément important pour l’intégration dans les classes officielles. Un soutien psychosocial, tant pour les enfants que pour les parents, les aide à surmonter les expériences traumatisantes. Les centres bien équipés gérés par SOS Villages d’Enfants sont comme une oasis pour les demandeurs d’asile dont le quotidien est marqué par des peurs existentielles et l’insécurité. « Il est important de nouer des relations positives avec les enfants ainsi que les familles et d’assurer une stabilité dans la mesure du possible », souligne ma collègue Eleonora, assistante sociale et directrice du centre. Dimitra, de l’autorité locale chargée de l’asile, ajoute qu’il est également crucial d’obtenir l’adhésion de la population grecque pour réussir l’intégration. La crise économique a empiré en raison de la pandémie et de ses conséquences. De nombreux Grecs sont également touchés par la pauvreté. Dans la ville portuaire d’Héraklion, SOS Villages d’Enfants accompagne 15 enfants grecs et leurs familles en plus de 55 enfants réfugiés.
Alors que tous les enfants de Crète sont scolarisés, un quart des 350 enfants réfugiés pris en charge à Thessalonique ne vont pas à l’école publique, explique mon collègue Giorgos, du centre éducatif du village d’enfants SOS de la ville portuaire sur le continent. L’offre informelle de SOS Villages d’Enfants est donc la seule possibilité d’éducation pour ces enfants et ces jeunes. Les confinements ont également permis à des initiatives créatives de voir le jour : certains collègues de SOS Villages d’enfants Grèce ont conçu des Escape Game virtuels et enseignent aux enfants des connaissances en ligne de manière ludique. Dans la mesure du possible, il fallait s’assurer que les enfants puissent suivre les cours.
Grâce aux cours en ligne, nous étions en contact avec les enfants pendant le confinement et ce, n’importe où en Grèce.
Masques de protection faits main du centre social SOS d’Athènes
Dans la capitale, Athènes, j’ai eu l’occasion de regarder par-dessus les épaules des femmes qui cousent. Les mères, qui sont principalement originaires de Syrie ou d’Afghanistan, peuvent amener leurs enfants pour qu’ils poursuivent leur éducation. Outre la matière enseignée au sens strict et au sens large du terme, le renforcement de la confiance en soi joue également un rôle important. Les interprètes, quant à elles, tissent les fils de la communication et expliquent ma visite. Deux femmes ont récemment trouvé du travail. Pour la plupart d’entre elles, l’avenir est incertain. La procédure d’asile peut prendre plusieurs années. Mes collègues Antigone et Afrodite de SOS Villages d’Enfants Grèce ne cessent de me répéter combien il est important que les enfants ne décrochent pas en matière d’éducation. Car c’est le seul moyen de leur donner des perspectives, quel que soit l’endroit où ils se trouveront un jour.
Les mères peuvent amener leurs enfants pour une formation au centre de couture.
Urs Bernhard visite l’atelier de couture du centre social d’Athènes.
Si je peux rentrer chez moi sans problème après une semaine, l’odyssée continue pour des milliers d’enfants et de familles. Après toutes ces rencontres, notamment avec les enfants, la citation suivante me vient à l’esprit : « Tous nos efforts en faveur de l’enfant abandonné doivent en définitive être compris comme une contribution à la paix. » Malgré un voyage dans le passé et le présent de la Grèce, cette phrase n’a pas été écrite par un de ses philosophes, mais par le fondateur de SOS Villages d’Enfants.
Depuis octobre 2020, grâce au soutien du Secrétariat d’État aux migrations apporté sur les quatre sites en Crète, à Thessalonique, à Ioannina et à Athènes, nous avons…
- accompagné 54 enfants et leurs 26 parents dans le cadre d’un soutien psychosocial régulier,
- enseigné à 160 parents des compétences éducatives,
- fait cours à 584 enfants, dont 151 mineurs non accompagnés,
- été en contact avec 262 enfants, dont 121 mineurs non accompagnés, par le biais d’activités récréatives,
- enseigné à 24 femmes la couture et soutenu 30 femmes dans leur recherche d’emploi.